Une contribution de Daniel Cohen, remarquable, aujourd'hui au journal Le Monde: Banlieues, chômage et communautés.
Il explique un phénomène, celui du chômage et de la rupture sociale des certaines catégories de jeunes des cités, non pas par leurs origines ethniques, religieuses ou culturelles, mais par les succès ou les non-succès des générations (immédiatement) précédentes.
Pour fonder sa proposition, Cohen élabore sur un fait social (et culturel) trop peu pris en compte dans les recherches et invisible dans les statistiques: celui de la solidarité familiale-communautaire. Les parents fournissent les moyens pour les jeunes à aller gagner leur vie, de préférence dans une entreprise familiale ou faisant partie de la communauté, naturellement dans leur propre intérêt (soutien pendant leur vieillesse).
C'est un motif aussi pour discipliner et orienter les jeunes, vers l'école, l'apprentissage. Les jeunes, une fois adultes, transmettront ce "capial" (qui est en partie non-monétaire) aux générations suivantes.
Une fois cette chaîne brisée, par exemple à cause d'une exclusion massale du travail d'une génération, les parents n'auront plus rien à transmettre, les jeunes révoltent contre eux, car la discipline que les parents veulent imposer, ne mène à rien. Elle n'a plus de sens.
Les vieux se retirent, dans une attente impuissante. Les jeunes prennent la rue. Et ils seront reniés par leurs enfants à leur tour.
Il n'y a pas seulement des ruptures de générations dans ces cas-là, mais aussi des ruptures entre hommes et femmes. Les femmes régissent différemment à ces événéments-là. Elles se trouvent des boulots, suivent mieux l'enseignement et s'occupent des enfants, souvent comme mère célibataire.
Dans un monde avec un niveau assez bas de solidarité au niveau national, comme les Etats-Unis, ce méchanisme communautaire est plus évident qu'ailleurs, par exemple en France, où, depuis la fin du dix-neuvièmle siècle, l'éducation est affaire d'état. Et la solidarité aussi. On y est si frileux à prendre en compte les faits communautaires, fédéralistes, qu'elles sont refoulées dans les recherches et l'observation de la réalité de tous les jours.
Pourtant, comme Cohen constate, la société française est en partie toujours fondée sur ces solidarités familiales, communautaires. C'est ce qui rend un niveau moyen de chômage assez élevé (10%) encore tolérable pour les catégories de la population qui n'ont pas connu ces ruptures d'exclusion dans les générations immédiatement précédentes. On se débrouille, entre parents et enfants, oncles, cousins, dans le village, entre les copains d'une profession particulière.
Les paratiquants de la régénération urbaine connaissent tout cela. L'important, c'est que l'on commence apparemment à s'en rendre compte ailleurs aussi.
Je trouve que l'intervention de Cohen au "Monde" est un signal très utile, qu'il faut arrêter de chercher exclusivement les problèmes et les solutions dans les quartiers à difficultés dans le domaine de la culture, de la religion ou dans le fonctionnement de l'accès au travail.
Sans renier une responsabilité générale étatique, il s'avérera (et il s'est avéré) parfaitement viable à réparer cette rupture des générations qui empêche qui un certain communautarisme joue son rôle bénéfice.
Je pense à l'application des programmes-histoire, par exemple, qui renouent l'actualité et le présent, qui ressoudent les générations, en remettant à la lumière les savoirs utiles des anciens et les savoirs nouveaux des jeunes qui ont à se battre pour une place digne dans la société.
C'est un débat à suivre. et à transformer en actions concrètes!
Même dans les Etats qui situent
12 janvier 2006
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