Depuis 20 ans, je vis avec les Bruxellois.
Ils sont bilingues, penchants vers le Français. Ils sont minoritaires dans leur pays, un pays qui est âprement divisé entre Flamands et Wallons. Ils sont même minoritaires dans leur ville à eux, envahie par les immigrés européens, africains et asiatiques.
Moi, né Batave, passé par les rébellions d'Amsterdam, je ronge mon frein.
Pourquoi mes concitoyens, les Bruxellois et les Bruxelloises, ne se révoltent ils/elles pas ? Le jeu des réformes belges les a relégués au statut d'orphelins nationaux. L'enseignement de la grande ville est géré par une configuration impénétrable de commissions, de comités et de cellules de coordination, qui se développent en rêve cauchemardesque. Je ne vous explique pas pourquoi. Imaginez-vous simplement qu'il faut une commission de coordination des autres commissions de coordination que ne coordonnent pas à cause de manque de coordination.
Kafka ! Kafka au carré !
Début du seizième siècle, mon compatriote Érasme (de Rotterdam) a visité Bruxelles. Il a vécu sur les collines de Saint-Gilles et d'Anderlecht. Il venait d'écrire la « Laus Stultitiae », la Célébration de la Bêtise, un jeu sublime et surréaliste avant la lettre. Un bateau rempli de fous traverse l'histoire : « het Narrenschip ». Ce bateau n'a toujours pas trouvé son port chez nous.
L'année 1511 a vu une rébellion des Bruxellois sans précédent et sans conséquence.
Tout comme les bourgeois de la ville de Romans en France (voir: « Le Carnaval de Romans » par Leroy Ladurie), ils refusèrent, après le Mardi Gras, d'abandonner les droits et coutumes établis par l'inversion carnavalesque des pouvoirs. Pendant des semaines, ils gardaient les reins de la ville entre leurs mains, combattaient les Bourguignons des collines au-dessus de la ville, réfutaient les droits de la cathédrale Sainte Gudule fondée par les usurpateurs, etc.
Aujourd'hui, il n'y a plus assez de vrais "Bruxellois à l'ancienne" pour réclamer nos droits. Les nostalgiques de la vieille Belgique francophone s'éteignent. Ils sont remplacés par leurs enfants et leurs petits-enfants qui ont perdu la confiance en la Belgique de papa. C'est vrai aussi pour les francophones wallons et autres, qui sont venus habiter la Ville et qui s'identifient à leur ville, à leur région, encore sans y trouver une identité prononcée.
Mais ils ne sont pas seuls. Les jeunes Flamands qui viennent occuper les quartiers du centre (gentrification) n'aiment certainement pas l'impossibilisme séparatiste des partis flamands qui veulent « reprendre » la ville de Bruxelles. Ils se sentent bien Bruxellois, mais il leur manque un point d'identification régional. Pas étonnant, qu'ils ne se mobilisent pas non plus pour une solution équitable, multilingue, et revigorante pour la ville.
C'est l'immobilité belge, quoi. Attendre, ne pas bouger, se débrouiller en cachette. Pourtant, une action visible est nécessaire ! La grande ville de Bruxelles n'est ni flamande, ni wallonne. Elle est Bruxelles. Rien d'autre.
Une chance unique, à mon avis, à créer un espace libre, ouverte et vraiment européenne.
Et à l'adresse de mes amis flamands d'Anvers, de Gand, de Louvain : Si vous ne voulez pas de nous, bas les pattes devant Bruxelles ! Les Néerlandophones de Bruxelles sauront se débrouiller tout seuls. Nous aimons notre ville, nous vivons ensemble avec nos voisins francophones. Nous voulons une ville qui nous accepte tous. Elle existe, mais elle est menacée par les deux autres grandes régions.
Pour moi, comme pour beaucoup d'autres, Bruxelles est unique. Sauvegardons la ville ouverte au monde !!!
Cet article, légèrement modifié depuis, fut publié sur la Chronique d'abonnés du journal Le Monde le 17 avril 2010 par mon alter ego Toto le Psycho. Le résultat des élections législatives fédérales du 13 juin 2010 s'annonce catastrophique pour la Ville-Orpheline.Ils sont bilingues, penchants vers le Français. Ils sont minoritaires dans leur pays, un pays qui est âprement divisé entre Flamands et Wallons. Ils sont même minoritaires dans leur ville à eux, envahie par les immigrés européens, africains et asiatiques.
Moi, né Batave, passé par les rébellions d'Amsterdam, je ronge mon frein.
Pourquoi mes concitoyens, les Bruxellois et les Bruxelloises, ne se révoltent ils/elles pas ? Le jeu des réformes belges les a relégués au statut d'orphelins nationaux. L'enseignement de la grande ville est géré par une configuration impénétrable de commissions, de comités et de cellules de coordination, qui se développent en rêve cauchemardesque. Je ne vous explique pas pourquoi. Imaginez-vous simplement qu'il faut une commission de coordination des autres commissions de coordination que ne coordonnent pas à cause de manque de coordination.
Kafka ! Kafka au carré !
Début du seizième siècle, mon compatriote Érasme (de Rotterdam) a visité Bruxelles. Il a vécu sur les collines de Saint-Gilles et d'Anderlecht. Il venait d'écrire la « Laus Stultitiae », la Célébration de la Bêtise, un jeu sublime et surréaliste avant la lettre. Un bateau rempli de fous traverse l'histoire : « het Narrenschip ». Ce bateau n'a toujours pas trouvé son port chez nous.
L'année 1511 a vu une rébellion des Bruxellois sans précédent et sans conséquence.
Tout comme les bourgeois de la ville de Romans en France (voir: « Le Carnaval de Romans » par Leroy Ladurie), ils refusèrent, après le Mardi Gras, d'abandonner les droits et coutumes établis par l'inversion carnavalesque des pouvoirs. Pendant des semaines, ils gardaient les reins de la ville entre leurs mains, combattaient les Bourguignons des collines au-dessus de la ville, réfutaient les droits de la cathédrale Sainte Gudule fondée par les usurpateurs, etc.
Aujourd'hui, il n'y a plus assez de vrais "Bruxellois à l'ancienne" pour réclamer nos droits. Les nostalgiques de la vieille Belgique francophone s'éteignent. Ils sont remplacés par leurs enfants et leurs petits-enfants qui ont perdu la confiance en la Belgique de papa. C'est vrai aussi pour les francophones wallons et autres, qui sont venus habiter la Ville et qui s'identifient à leur ville, à leur région, encore sans y trouver une identité prononcée.
Mais ils ne sont pas seuls. Les jeunes Flamands qui viennent occuper les quartiers du centre (gentrification) n'aiment certainement pas l'impossibilisme séparatiste des partis flamands qui veulent « reprendre » la ville de Bruxelles. Ils se sentent bien Bruxellois, mais il leur manque un point d'identification régional. Pas étonnant, qu'ils ne se mobilisent pas non plus pour une solution équitable, multilingue, et revigorante pour la ville.
C'est l'immobilité belge, quoi. Attendre, ne pas bouger, se débrouiller en cachette. Pourtant, une action visible est nécessaire ! La grande ville de Bruxelles n'est ni flamande, ni wallonne. Elle est Bruxelles. Rien d'autre.
Une chance unique, à mon avis, à créer un espace libre, ouverte et vraiment européenne.
Et à l'adresse de mes amis flamands d'Anvers, de Gand, de Louvain : Si vous ne voulez pas de nous, bas les pattes devant Bruxelles ! Les Néerlandophones de Bruxelles sauront se débrouiller tout seuls. Nous aimons notre ville, nous vivons ensemble avec nos voisins francophones. Nous voulons une ville qui nous accepte tous. Elle existe, mais elle est menacée par les deux autres grandes régions.
Pour moi, comme pour beaucoup d'autres, Bruxelles est unique. Sauvegardons la ville ouverte au monde !!!
Pour savoir plus sur Bruxelles et mes idées sur le sort de la capitale de l'Europe, voir sur HUIBSLOG la Page BruXsel, avec les quinze articles les plus récents qui se réfèrent à Bruxelles, ou lisez mon Et si les Bruxellois créaient leur Communauté à eux? du 12 janvier 2008, également sur Huibslog.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire